Comment aider vos enfants et vos petits-enfants à se construire ? En leur racontant l’histoire de leur famille !
C’est ce que Fatima avait à cœur de faire pour ses petites-filles.
Elle nous parle de la façon dont elle a écrit le livre de ses origines, des découvertes merveilleuses qu’elle a faites, de tout ce qu’elle a aimé dans cette aventure mais aussi des difficultés rencontrées.
Quel était votre but en écrivant ce livre ?
Étant fille d’immigrés d’Algérie, je voulais que mes petites-filles connaissent leurs origines : les noms et prénoms de leurs ancêtres et bien sûr leurs difficultés, leurs joies, le contexte historique, leurs métiers…
De quoi parle votre livre ?
Mon livre raconte l’histoire de mes parents et de ceux de mon mari.
J’y parle aussi de nos grands-pères côté maternel et d’un illustre ancêtre (du 16e siècle) côté paternel.
Lors d’un voyage en Algérie il y a 20 ans, un cousin germain de mon père m’avait raconté la saga de cet aïeul (lire l’extrait à la fin de cet article).
J’avais noté ces précieux renseignements sur un carnet. Mais je voulais trouver confirmation de cette histoire.
En 2017, j’ai eu l’idée d’écrire à un écrivain algérien portant le même nom que moi. Ô surprise ! Il m’a répondu en confirmant les dires du cousin de mon père. J’ai aussi trouvé des traces de cet ancêtre grâce à Internet.
À partir du moment où vous y avez pensé, combien de temps avez-vous mis pour passer à l’action ?
Je pense que j’ai commencé à y penser à la naissance de ma première petite-fille.
J’ai commencé à me documenter six ans après.
Grâce à votre blog et à vos bons conseils, je me suis lancée.
L’année suivante, j’ai envoyé le texte à une amie, prof d’histoire, pour qu’elle le corrige.
Quelques mois plus tard, une autre amie a fait les dernières corrections.
Quels choix avez-vous faits pour ce livre ?
J’ai écrit un texte par personnage, en le reliant à des événements historiques.
Cela dit, j’ai supprimé les chapitres concernant l’histoire des Berbères et des Arabes, car cela me paraissait trop long à traiter. Je le regrette un peu car, à présent, il me semble que je saurais le faire !
J’ai ajouté des photos de nos parents, de la palmeraie de mon grand-père, d’un bâtiment religieux où sont enterrés quelques-uns de mes ancêtres, des cartes géographiques.
Des ancêtres de Fatima reposent dans la mosquée de Biskra.
Quel était votre rythme de travail ?
Je travaillais le soir, entre 21 h et 23 h environ.
Et tout au long de la journée à l’époque où nous faisions les dernières corrections. Car j’avais hâte de terminer, pour passer au projet suivant !
Combien de temps avez-vous mis pour écrire le 1er jet ?
Il s’est passé un an entre la réunion de la documentation et la première correction. Ensuite, le temps passé à corriger a été bien plus long que le temps de l’écriture.
Le premier jet comptait 106 pages. Après la dernière correction, il en restait 70.
Quelle a été votre méthode pour corriger ?
La première étape a été de supprimer les paragraphes trop longs ou qui ne correspondaient pas au thème choisi (l’Histoire).
J’ai cherché des synonymes (Crisco, Reverso) et des expressions qui exprimaient le mieux ma pensée (citations).
J’ai aussi traqué les adverbes, les répétitions. J’ai supprimé beaucoup de points de suspension, car j’en abuse.
Les deux amies que j’avais sollicitées m’ont aussi beaucoup aidée.
Sur quel logiciel avez-vous travaillé ?
J’ai utilisé Pages, le logiciel de traitement de texte de mon Mac.
Il propose 180 thèmes graphiques et une multitude d’options permettant de créer des documents, des rapports, des lettres… On peut ajouter des photos.
Mais j’ai eu des problèmes pour effectuer la pagination. C’est pourquoi j’ai fait appel à une infographiste.
Je compte prendre des cours d’informatique pour pouvoir mener seule mon prochain projet de A à Z (à part les relectures et les dernières corrections).
Comment avez-vous fait imprimer votre livre ?
J’ai fait appel à un imprimeur de ma région. Ma voisine artiste-peintre, cliente chez eux depuis de longues années, me l’avait conseillé. Je suis contente de leur travail.
Auprès de qui avez-vous diffusé vos écrits, et sous quelle forme ?
J’ai fait imprimer 30 exemplaires pour mes sœurs et frères, un beau-frère, mes enfants, mes petites-filles, quelques nièces et quelques amies.
J’ai choisi un format A5, avec une impression en noir et blanc sur papier ivoire.
Globalement, quelles difficultés avez-vous rencontrées ? Comment les avez-vous surmontées ?
En annonçant mon projet à ma belle-famille, j’ai constaté des réticences chez certains, un blocage. J’étais pourtant dans la bienveillance, et j’ai essayé en vain de les rassurer.
Mais j’ai pris la décision d’aller jusqu’au bout de mon travail.
Tant pis si je ne peux pas diffuser ce récit auprès d’un large public. Par contre, je vais contacter une association de ma région. J’aimerais participer à son projet, qui est de favoriser les échanges entre générations, en racontant aux élèves de primaire l’histoire d’une famille d’immigrés (son passé, son présent et son avenir).
J’ai à cœur que les enfants venus d’ailleurs connaissent leurs origines et en soient fiers. Cela éviterait bien des drames !
De quoi auriez-vous eu besoin ? Qu’est-ce qui vous a manqué ?
J’ai buté sur la concordance des temps, la syntaxe, la ponctuation.
Heureusement, mes deux amies se sont chargées bénévolement de ce travail indispensable.
Qu’avez-vous aimé dans cette aventure ?
Les recherches sur Internet, les échanges avec mes sœurs, mon mari, des amis. J’ai appris beaucoup de choses sur les parents de mon époux.
Je me suis aussi amusée à inventer des scénarios. Par exemple, le nom de famille de ma belle-mère signifie « Venise » en arabe. Comme les Vénitiens ont commercé à Constantine, ville proche du village natal de mon mari, cela m’a donné l’idée d’inventer une histoire.
J’ai imaginé un ancêtre vénitien qui, lors d’un voyage en Afrique du Nord, serait tombé amoureux et aurait décidé de poser ses bagages dans le village natal de sa belle (qui est aussi celui de mon mari et de sa mère).
Qu’en retirez-vous ?
J’ai cherché et trouvé des racines inconnues. J’ai mieux compris le parcours terrestre de nos parents et grands-parents, ce qui m’a rendue apaisée et fière.
J’ai découvert ma ville natale à travers les belles descriptions d’André Gide et les récits enthousiastes de voyageurs émerveillés.
Je me suis aussi enrichie avec les nombreuses citations d’écrivains. Elles m’ont aidée à formuler des impressions, des sentiments.
Enfin, j’ai honoré la mémoire de ma mère et celle de mon père, que je n’ai pas connu.
Avez-vous un autre projet ?
Je désire écrire mes souvenirs, car l’écriture est indispensable à ma vie !
Que conseilleriez-vous aux lecteurs du blog ?
Allez-y, foncez !
L’introduction du livre de Fatima
« Écrire !
À 13 ans, j’ai commencé un roman.
Écrire !
À 60 ans, j’ai gribouillé deux livres pour enfants.
Aujourd’hui, ma chérie, je te propose un voyage passionnant à travers le temps. Pour te raconter “quelques bouts” de notre histoire familiale commune.Je ne suis pas sûre que mon récit soit la vérité vraie. En effet, “l’historien n’atteint pas la vérité”. De plus, Marguerite Duras a dit : “Écrire, c’est à la fois se taire et parler.”
Parler, ça soulage ! Se taire, ça protège ! Donc, je tairai certains prénoms et faits, par respect pour les personnes de mon entourage.
Mais je t’offre le fruit sincère de mes recherches. Je veux t’exposer, te narrer, t’expliquer nos origines. Et te transmettre les noms de nos ancêtres. Car je veux que tu saches, à peu près, d’où tu viens !
Pour moi, c’est important. Pourquoi ? Parce que je désire t’encourager à accepter tes diverses racines : berbères, arabes et bretonnes. »
Des moments forts
« J’ai entendu le nom de ce lointain ancêtre, pour la première fois, lors de mon voyage en Algérie. De la bouche d’Ali, le cousin germain de mon père. C’était en 1999.
Mon oncle Aziz l’avait invité à partager un repas, afin de me conter la saga de notre famille. Avant l’arrivée d’Ali, j’avais mal au ventre. Oui, j’avais peur.
Comme si mon père, cet inconnu, allait surgir devant moi. Ali lui ressemblait-il ? Je ne le saurai jamais, car je ne possède aucune photo de mon papa.
En tout cas, ce jour-là, mon parent portait des lunettes. Comme moi. Vêtu d’un costume rayé orné d’une pochette blanche, il affichait une élégance naturelle. Comme il était heureux de dévoiler, avec force détails, le parcours de notre aïeul Abdelmoumen !
À ce moment-là, ses longues explications m’ont apaisée. »
2 réponses sur « « Je voulais que mes petites-filles connaissent leurs origines et en soient fières » »
Merci pour ce beau témoignage. Voir que l’auteur pense à écrire son livre en 2010, commence à se documenter en 2016 et effectue les dernières corrections en 2018: tout cela permet de dédramatiser et de se dire qu’avoir du retard à l’allumage (de la difficulté à se lancer) n’est pas complètement anormal
Fort juste ! Un temps de maturation est très utile et parfois franchement nécessaire.
Parfois, cependant, le « temps de maturation » masque une difficulté à se lancer parce qu’on n’ose pas, qu’on est trop perfectionniste ou qu’on ne sait tout simplement pas comment s’y prendre, par exemple. Le délai est alors beaucoup plus long…
Dans tous les cas, il vaut mieux dédramatiser, en effet, et déculpabiliser.
Merci pour votre commentaire, Sylvain